Séminaire doctoral transversal 2022-23 : « Les spiritualités, un lieu théologique ? »

Coordonné par le Pr D. Jacquemin

Une première question peut traverser l’esprit : pourquoi initier un séminaire en théologie à propos « des spiritualités » ? Cette question est bien sûr légitime.

Le premier centre d’intérêt est l’appropriation de ce thème par d’autres disciplines, particulièrement celles relevant du soin. Lorsqu’on se réfère à Pubmed et qu’on tape « spirituality »[1], on constate une explosion réelle du nombre de publications à ce sujet ; c’est, ce que nous appellerions volontiers « un signe des temps » (Gaudium et spes n°4§1)[2] qu’il importe de scruter avec attention :

-          Spirituality : 203 publications (1996), 1371 (2016), 1445 (2017), 1445 (2018), 1515 (2019), 1998 (2020), 1218 en juin 2022.

-          Spiritual care : on constate la même montée en puissance avec 1271 publications en 2021, 678 en juin 2022.

C’est ce même engouement que l’on peut constater dans les librairies où des ouvrages envisageant des spiritualités issues de traditions religieuses les plus diverses (chrétiennes, juives, musulmanes, bouddhistes, hindouistes…) ou d’autres courants de pensée côtoient les livres traitant de « bien-être » et de mindfulness.

Quelles sont les faces positives et plus difficiles d’un recours aux spiritualités dans une société pluriculturelle et sécularisée, tant pour le sujet lui-même que pour appréhender une nouvelle forme de vivre ensemble[3] ? Telle pourrait être une autre veine de questionnement : que dit ce recours « au spirituel » par les femmes et les hommes d’aujourd’hui ? Et ce qui en est dit de l’humain ne peut-il pas aussi affirmer conjointement quelque chose de Dieu ?

L’enjeu serait de considérer en quoi et comment « l’engouement contemporain » pour les questions de spiritualité pose des questions de fond à la théologie dans la diversité de ses champs de recherche. L’enjeu n’est donc pas de « définir » le spirituel a priori, ni de réaliser un diagnostic de société mais de considérer en quoi et comment sa prise en compte dans certains champs de recherche pose de nouvelles questions à la théologie. En d’autres termes, en quoi la référence « aux spiritualités » déplace certains axes de la théologie ? Lesquels ? Pourquoi ? Quelles formes de « spiritualités » se manifestent dans les textes fondateurs des religions (Bible, Coran…) ? Quels rôles ces écrits jouent-ils dans le spirituel ? En retour, à quelles relectures de ces documents et des grandes thématiques de la réflexion théologique les nouvelles questions évoquées ci-dessus invitent-elles ? Permettent-elles d’y redécouvrir une plus grande diversité qu’entrevue jusqu’à présent ?

 

Prs Eric Gaziaux, Dominique Jacquemin, Matthieu Richelle



[2] « Pour mener à bien cette tâche, l’Église a le devoir, à tout moment, de scruter les signes des temps et de les interpréter à la lumière de l’Évangile, de telle sorte qu’elle puisse répondre, d’une manière adaptée à chaque génération, aux questions éternelles des hommes sur le sens de la vie présente et future et sur leurs relations réciproques. Il importe donc de connaître et de comprendre ce monde dans lequel nous vivons, ses attentes, ses aspirations, son caractère souvent dramatique. » Constitution pastorale Gaudium et spes, n°4 §1.

[3] De Kesel J., Foi & religion dans une société moderne, Paris, Salvator, 2021.